Aire protégée
Pour les articles homonymes, voir AP et AMP.
Une aire protégée (AP) (de l'anglais protected area, PA) est, selon la définition de l'UICN, « un espace géographique clairement défini, reconnu, dédié et géré, par des moyens légaux ou autres, afin de favoriser la conservation à long terme de la nature et des services écosystémiques et des valeurs culturelles qui y sont liés »[1].
En 2018, il y a un consensus scientifique sur le fait que protéger les habitats et leurs espèces reste le meilleur moyen de défendre la biodiversité, mais à condition que la protection soit réelle dans les parcs et réserves… selon Jones et al. (2018) la cartographie mondiale la plus récente et complète des pressions humaines montre que si l’on est passé 9 à 15 % des terres émergées protégées entre 992 et 2018, six millions de kilomètres carrés (soit 32,8 % de terres protégées) sont néanmoins soumis à une pression humaine intense[2]. Plus de 55 % des aires protégées avant la ratification de la Convention sur la diversité biologique (1992) ont depuis subi une augmentation de la pression humaine ; seules les grandes zones strictement protégées se montrent potentiellement efficaces, dans certains pays, essentiellement situées dans l’hémisphère sud[2].
Sommaire
1 Terminologie
2 Histoire et vue globale
3 Intérêts et efficacité
3.1 Mesure de l'efficacité d'une aire protégée
3.1.1 Viabilité
3.1.2 Connectivité
3.1.3 Représentativité
3.1.4 Réplicabilité
3.1.5 Indicateurs
3.1.5.1 Indicateurs bio-physiques
3.1.5.2 Indicateurs socio-économiques et de pression humaine
4 Limites
5 Réglementations
6 Accessibilité au public
7 Surveillance
8 Typologie d'aires protégées dans le monde
9 Statuts des aires protégées dans le monde
9.1 En Europe
9.1.1 Belgique
9.1.2 Bulgarie
9.1.3 Espagne
9.1.4 France
9.1.5 Hongrie
9.1.6 Moldavie
9.1.7 Serbie
9.1.8 Suisse
9.2 En Amérique
9.2.1 Argentine
9.2.2 Brésil
9.2.3 Canada
9.2.3.1 Québec
9.2.4 Colombie
9.2.5 Pérou
9.3 En Asie
9.3.1 Chine
9.3.2 Inde
9.3.3 Indonésie
9.3.4 Japon
9.3.5 Kazakhstan
9.3.6 Mongolie
9.3.7 Népal
9.3.8 Pakistan
9.3.9 Sri Lanka
9.3.10 Yémen
9.4 En Afrique
9.4.1 Botswana
9.4.2 Burkina Faso
9.4.3 Burundi
9.4.4 Cameroun
9.4.5 Côte d'Ivoire
9.4.6 Kenya
9.4.7 Madagascar
9.4.8 Mali
9.4.9 Mauritanie
9.4.10 Namibie
9.4.11 Niger
9.4.12 République centrafricaine
9.4.13 Sénégal
9.4.14 Seychelles
9.4.15 Tanzanie
10 Le cas particulier des forêts tropicales
11 Notes et références
12 Voir aussi
12.1 Articles connexes
12.2 Liens externes
Terminologie |
En français, le terme d'« espace protégé »[3] ou d'« espace naturel protégé »[4] remplace parfois dans le langage le terme officiel d'« aire protégée ».
On parle d'aire marine protégée (AMP) quand l'espace géographique bénéficiant d'un statut de protection comprend en majorité ou en totalité une zone marine[5]. En 2000, 4 600 aires marines protégées dans le monde couvraient 0,6 % de la surface des océans, contre 9 % des surfaces terrestres[6]. Selon Daniel Pauly, en 2009, cette surface a augmenté, mais ne couvrirait qu'environ 0,8 % de l'océan. Et seul 1/10e environ de ces 0,8 % environ est réellement et efficacement protégé. La croissance de la superficie classée en AMP n'est que de 5 % par an, il faudra donc attendre à ce rythme 15 ans pour espérer un doublement de la surface théoriquement protégée.
On parle d'aire protégée transfrontalière lorsque l'espace géographique protégé agrège et assure un continuum d'aires protégées de part et d'autre des frontières de plusieurs pays (en général cet espace existe formellement au travers d'un accord international qui définit des règles coordonnées de gestion entre les aires protégées nationales agrégées).
Histoire et vue globale |
La toute première aire protégée du monde daterait de l'an 200, au Sri Lanka, le roi Devanampiya Tissa ayant établi un sanctuaire de la vie sauvage[7]. À l'ère moderne, l'un des premiers parcs nationaux est celui du Yellowstone créé en 1872 aux États-Unis, bien qu'un décret de 1864 conférât aussi une protection au parc national de Yosemite (premier parc régional).
Une aire protégée est un outil essentiel au maintien des espaces naturels et donc à la conservation de la biodiversité qu’ils abritent. Des études montrent néanmoins que différents critères de taille, nombre et bonne gouvernance doivent être réunis pour que la protection soit effective. Selon une étude publiée en 2015[8] : à contexte socio-économique comparable, l'accent mis par un pays sur la mise en œuvre de réserves en visant un haut degré de protection sera prédicteur de moindres risques de déclin de la biodiversité dans ces zones protégées si la proportion d'aires protégées de Catégorie I-IV de l'UICN est élevée dans les réseaux d'aires protégées du pays. Cette étude suggère que les politiques de niveau national peuvent considérablement influer sur le sort de la biodiversité en zone tropicale[8].
En 1992 la plupart des États ont adopté la Convention sur la diversité biologique lors du sommet de la Terre à Rio de Janeiro. L’article 8 de cette convention encourage les États parties à la convention à développer un réseau d’aires protégées dans les espaces sous leur juridiction (Plusieurs pays n’ont cependant jamais signé ou ratifié la convention sur la diversité biologique, comme les États-Unis ou le Vatican par exemple). La dixième conférence des États parties à la convention qui s’est tenue à Nagoya au Japon en octobre 2010, a adopté un Plan stratégique révisé et actualisé pour la diversité biologique pour la période 2011-2020, incluant les « Objectifs d'Aichi » pour la biodiversité.
L’objectif d’Aïchi no 11 a fixé un but chiffré de création d’aires protégées qui guide l’action des institutions chargées de la création et de la gestion d’aires protégées dans tous les États parties. Il doit aussi guider les appuis aux pays en développement pour le renforcement de leur réseau d’aires protégées.
L’objectif mondial actuel est donc d’atteindre au moins 17 % des zones terrestres et d’eaux intérieures (Hors Antarctique) et 10 % des zones marines et côtières sous statut d’aire protégée à l’horizon 2020, soit respectivement 22 755 906 km2 d’espaces terrestres et d’eaux intérieures et 37 500 000 km2 d’espaces marins et côtiers.
Aujourd'hui, « un peu plus de 100 000 sites terrestres et marins sont concernés couvrant à peu près 19 millions de km², soit l’équivalent de la surface combinée des États-Unis continentaux et du Canada »[9].. Depuis 1973, leur superficie a été multipliée par quatre[10].
Une cartographie mondiale des aires protégées peut être consultée sur le site anglophone « Planète protégée »[11] de l'UICN et du PNUE.
Intérêts et efficacité |
À condition qu'elles soient suffisamment grandes et judicieusement placées[12], et qu'on lutte aussi contre la dégradation générale de l'océan, les réserves sous-marines et aires marines protégées présentent plusieurs intérêts :
- intérêt écologique (protection et restauration du patrimoine naturel) et leur gestion restauratoire le cas échéant ;
- intérêt touristique ;
- intérêt culturel et pédagogique (via la plongée sous-marine, les études, films et images diffusés par les médias, les bateaux avec chambre de vision sous-marine...).
- intérêt culturel ;
- intérêt agricole et industriel (réserve de gènes potentiellement utiles) ;
- intérêt économique des aménités et services écosystèmiques rendus par les zones protégées ; en 2008, le CREDOC a fait en France, sur demande de l’établissement public Parcs nationaux de France (PNF), une revue documentaire de 100 travaux scientifiques avec mise en perspective critique des différentes méthodologies existantes pour appréhender la valeur économique et sociale des espaces naturels protégés[13].
Mesure de l'efficacité d'une aire protégée |
L'efficacité d'une aire protégée se mesure au niveau local mais aussi au niveau des réseaux d'espace naturels. Plusieurs critères peuvent entrer en ligne de compte pour mesure cette efficacité[14] :
Viabilité |
L'aire protégée devrait être viable en elle-même et à long terme, indépendamment du reste du réseau d'aires protégées.
Ce critère nécessite l'acquisition de données environnementales et l'appui d'un comité scientifique[15]. Il nécessite aussi des aires suffisamment vastes, écologiquement intègres et protégées et gérées (par exemple grâce à une gouvernance participative[16] et à des moyens efficace de surveillance) de manière à conserver l'adéquation entre la vulnérabilité du milieu au dérangement et les pressions anthropiques locales et périphériques à la l'aire protégée, en particulier en présence d'agriculture[17]/élevage[18] ou pastoralisme[19], transhumance[20], de déforestation et de tourisme[21].
Leur viabilité implique souvent un financement pérenne. Étant donné la valeur des aires protégées en termes de services écosystémiques, leur financement et leur gestion pourraient ou devraient relever d'écotaxes et du principe de solidarité écologique[22].
Des outils de modélisation ou s'appuyant sur la reconnaissance de forme et l'intelligence artificielle cherchent à faciliter l'évaluation de la viabilité de systèmes écologiques[23].
Connectivité |
Beaucoup d'espèces sont mobiles et ont tendance à sortir d'une aire protégée. Ceci est d'autant plus vrai que sa taille est limitée. Une aire protégée fonctionne donc le plus souvent en réseau qui doit être suffisamment connecté pour répondre aux besoins de ces espèces mobiles.
Représentativité |
Une aire protégée doit répondre aux enjeux d'un territoire et protéger un échantillon représentatif des espèces menacées.
Réplicabilité |
Un niveau d'un réseau d'aires protégées, il est nécessaire qu'un élément fortement menacé soit protégé dans plusieurs espaces. Outre les échanges potentiels, cela permet une sécurité en cas de problème imprévu sur l'un de ces espaces.
Indicateurs |
L'efficacité d'une aire protégée est mesurée via des indicateurs et bioindicateurs choisis selon les enjeux et objectifs. Ce type d'étude se déroule généralement en 4 étapes :
- Sélection des indicateurs
- Organisation de l'évaluation
- Conduite de l'évaluation proprement dite
- Communication des résultats et adaptation de la méthode de gestion[24].
Un indicateur est une information mesurée sur une période de temps et donnant une information sur des changements spécifiques de certaines caractéristiques de l'aire protégée. Il permet d'estimer des aspects qui ne sont pas directement mesurables, comme son « efficacité ». Il est, en outre, nécessaire de faire appel à une batterie d'indicateurs afin de mettre en évidence la réalisation (ou non) des buts et objectifs annoncés[24]. Un indicateur se doit de répondre à cinq critères : mesurabilité (sur les plans qualitatifs et quantitatifs), précision (définition identique par tous), constance (dans le temps), sensibilité (variations proportionnelles aux changements de l'attribut mesuré), simplicité[25].
Les services s'occupant du littoral au sein de l'administration américaine des Océans et de l'atmosphère (NOAA) ont assemblé un inventaire d'outils d'aide à la décision pour AMP basé sur le SIG. Ce rapport se concentre essentiellement sur les outils SIG utiles pour les Aires Marines Protégées[26].
Indicateurs bio-physiques |
Une aire protégée étant avant tout un outil de conservation, les indicateurs de type bio-physique sont généralement les premiers auxquels s'intéressent les gestionnaires[24].
Les paramètres biologiques peuvent considérer l'abondance ou la structure de la population d'une espèce précise (que ce soit une espèce d'une importance culturelle importante, une espèce clé de voûte, endémique, ou encore particulièrement vulnérable). L'étude de composition en espèces des communautés présentes dans la zone protégée et le taux de recrutement de celles-ci. L'intégrité des relations trophiques entre ces différentes espèces permet de vérifier s'il n'y a pas eu de dérèglement entre niveau (par exemple à la suite de la disparition d'une espèce surexploitée prédatrice ou au contraire d'une proie).
Les paramètres abiotiques ou structuraux concernent la qualité de l'eau et du sol et la distribution et la complexité des habitats d'une part, et les mesures spatiales d'autre part. Ces dernières peuvent être la proportion de l'aire « restaurée » du point de vue de la population, de la biomasse ou de la communauté (par rapport à un état initial réel ou supposé), ou encore la proportion de la zone ne subissant pas d'impact anthropique (ou un impact réduit).
Les gestionnaires et scientifiques utilisent divers outils afin d'étudier ces paramètres et de cartographier les aires marines protégées, tel que les systèmes d'information géographique ou la télédétection (imagerie satellite et radar, photographie aérienne ou données acoustiques).
Indicateurs socio-économiques et de pression humaine |
Les facteurs socio-économiques et culturels jouent un rôle plus important que les facteurs bio-physiques dans l'aménagement ou l'efficacité d'une aire protégée[27].
L'utilisation d'indicateurs socio-économiques permet de prendre en compte les intérêts de toutes les parties prenantes au projet, de déterminer l'effet que les décisions prises ont sur eux et de démontrer la valeur des aires protégées au public et aux décideurs[24].
Les pressions humaines dans de nombreuses aires protégées peuvent être sous-estimées (artificialiation, orpaillage en Guyane, Brésil, Surinam, déforestation (illégale ou non) dans certains pays de l’Est dont en forêt de Forêt de Białowieża, viande de brousse en Afrique…) ⇒ Selon Jones & al. il importe donc que l’on produise des rapports fiables et transparents sur les vraies pressions humaines subies par les aires protégées…et que l’on affine les cibles à atteindre en termes d’efforts/investissements encore à faire pour stabiliser ou restaurer la biodiversité[2].
Limites |
Il ne suffit pas de protéger certains territoires pour restaurer ou même maintenir la biodiversité ; Ainsi :
- aux États-Unis le système des aires protégées est l’un des plus anciens et parmi les plus sophistiqués au monde[28], mais au vu des données disponibles sur la biodiversité potentielle et actuelle du pays, si ces aires protègent indéniablement des paysages exceptionnellement sauvages (Wilderness)[29], elles sont géographiquement mal situées et ne couvrent pas assez les espèces endémiques (les aires protégées de ce pays couvrent de vastes surfaces, mais leur configuration géographique est presque à l'opposé des modèles d'endémisme du pays[28] ; « la plupart des aires protégées sont dans l'Ouest, alors que les espèces vulnérables sont en grande partie dans le Sud-Est »). Une carte des nouvelles priorités a été dressée pour plusieurs taxons menacés (vertébrés terrestres, poissons d'eau douce, et arbres) ; elle désigne aussi des zones méritant une attention immédiate de conservation (dont la propriété foncière est publique ou privée)[28],[30].
- en Europe, le réseau Natura 2000, construit par les États à la demande de l'Europe est dans certains pays très incomplet ; les États ayant souvent classé des espaces quand cela était socioéconomiquement le plus acceptable plutôt que selon des priorités environnementales. Certains auteurs insistent sur le besoin de s'appuyer sur des données socio-économiques pour faire de la prospective en matière de conservation de la nature[31]
- il faut aussi que les espèces qui devraient naturellement le faire puissent aussi se déplacer d'une aire à l'autre, ce pourquoi un nombre croissant de pays ont développé un réseau écologique souvent dénommé trame verte.
- l'achat de terrain à fin de protection de la biodiversité est souvent insuffisant et a parfois des effets pervers[32].
- De nombreuses aires protégées ne le sont que sur le papier, et aucune mesure conservatoire concrète n'est mise en place. Ainsi, un grand nombre d'aires protégées de certains pays pauvres subissent une exploitation forcenée, notamment le braconnage d'espèces rares, sans que rien ne soit mis en place pour empêcher ce phénomène[33].
On cherche donc aussi à redessiner les périmètres d'aires protégées pour assurer la restauration puis la continuité des services écosystémiques les plus importants pour l'humanité et la biodiversité[34], mais ceci demande qu'ils soient mieux connus et évalués.
Corrélativement au réchauffement climatique et au déplacement de ressources alimentaires, les scientifiques observent d'importants déplacements de noyaux de populations animales ou végétales. Il a été proposé en 2009 de créer certaines aires protégées (marines notamment) au périmètre « mobile », pour suivre les modifications d'aire de répartition. Ces aires devraient aussi idéalement être plus grandes et mieux interconnectées[35] (de même que pour les forêts[36]). De nouveaux problèmes juridiques et de gestion seraient alors à résoudre.
Réglementations |
Elles varient selon les époques, les zones concernées et les États, de même pour les moyens et autorités de surveillance.
Elles sont établies par les autorités compétentes, nationales, régionales ou locales selon les cas.
Elles peuvent évoluer pour s'adapter à de nouveaux problèmes (dont les quads et engins nautiques). Par exemple les scooters des mers ont récemment été interdits par décret[37].
Accessibilité au public |
L'essentiel des aires protégées est accessible au public, parfois au prix du dérangement et de leur dégradation.
Ainsi en 2014 les aires naturelles protégées du monde ont reçu plus de 8 milliards de visiteurs dans l'année, soit environ 600 milliards $ de dépenses touristiques dans la période ; un gain économique qui dépasse de loin les moins de 10 milliards $ consacrés à la sauvegarde de ces sites chaque année dans le monde[38].
Ce calcul est une extrapolation à 140 000 aires protégées (en tenant compte de leur taille, leur éloignement, du PIB national, etc.) de données évaluées pour 550 sites ; Le modèle créé par cette étude peut aussi faire des prédictions sur les taux de visite (qui devraient encore augmenter… alors que déjà des problèmes critiques de surfréquentation existent pour divers sites)[38]. Les taux de visite sont les plus élevés (plus de trois milliards de visites/an) en Amérique du Nord où les aires protégées le sont souvent depuis plus d'un siècle[38]. Ils sont les plus bas en Afrique, où de nombreux pays sont à moins de 100 000 visites/an[38].
Les auteurs estiment que les dépenses mondiales pour les aires protégées sont « manifestement insuffisantes » (il leur faudrait 4 fois plus de budget selon le Dr Robin Naidoo du World Wildlife Fund), notamment pour limiter et compenser les effets du dérangement sur la dégradation des services écosystémiques (dont la valeur est incalculable) dans ces régions[38].
Selon un modèle proche de celui de la tragédie des communs, plus on aménage une aire protégée par le public, plus le public peut y affluer, au détriment de la naturalité du site et parfois de la possibilité d'y protéger les espèces qui constituent l'écosystème que ce public veut venir découvrir[38] ; Il faudrait aussi protéger les réserves naturelles de leurs visiteurs suggère un commentateur de l'étude qui rappelle que « les aires protégées sont protégées en raison de leurs capacités limitées à résister, absorber ou soutenir l'activité économique sans subir un changement qualitatif fondamental. des caractéristiques semi-quantifiables comme la naturalité, l'éloignement, l'intégrité et l'authenticité sont difficiles à maintenir et impossibles à remplacer. Cette inélasticité doit être prise en compte dans toute évaluation de leur valeur économique »[38].
Surveillance |
Les aires protégées nécessitent des dispositifs appropriés de contrôle du respect des lois et règlements, et de surveillance de l'environnement.
Ils s'appuient de plus en plus sur l'imagerie satellitale et aérienne, associée à l'utilisation de SIG et d'analyse de la structure écopaysagère, notamment dans les zones difficilement accessibles, notamment pour l'étude et le suivi de la fragmentation, des incendies, de l'orpaillage, etc.[39].
Typologie d'aires protégées dans le monde |
Le terme d'« aire protégée » est très peu utilisé par le grand public. De nombreuses réglementations et dénominations sont considérées comme telles et il n'existe pas de classification internationale d'une aire protégée ; une même dénomination peut recouvrir des critères de protection (réglementation, degré de protection, objectif, surface, gestionnaire...) très différents selon les pays. Ainsi les termes de parcs naturels ou réserves naturelles par exemple existent dans plusieurs pays et recouvrent des réglementations différentes. Une définition commune à plusieurs pays existe pour certains sites « protégés », car issus de conventions internationales (comme la Convention de Ramsar), ou de directives européennes ou internationales (comme la directive habitats).
La Commission mondiale des aires protégées de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a défini des catégories numérotées de 1 à 6, qui peuvent caractériser chaque aire protégée suivant l'intensité de la protection (de 1 : protection totale à 6 : gestion des activités humaines dans un objectif de gestion, restauration et protection)[40],[41].
Catégorie UICN | Caractéristiques et objectifs de gestion | Exemple d'aire protégée |
---|---|---|
Ia | Réserve Naturelle Intégrale : aire protégée gérée principalement à des fins scientifiques ou de protection des ressources sauvages | Le parc national suisse, les réserves écologiques du Québec, le Lauvitel (au sein du parc national des Écrins) en France |
Ib | Zone de Nature sauvage : aire protégée gérée principalement à des fins de protection des ressources sauvages | ... |
II | Parc national : aire protégée gérée principalement dans le but de protéger les écosystèmes et à des fins récréatives | Les cœurs de 9 des 10 parcs nationaux français |
III | Monument naturel : aire protégée gérée principalement dans le but de préserver des éléments naturels spécifiques | La zone naturelle unique de Los Estoraques en Colombie ou la réserve naturelle géologique du Luberon (au sein du parc naturel régional du Luberon) en France |
IV | Aire de gestion des habitats ou des espèces : aire protégée gérée principalement à des fins de conservation, avec intervention au niveau de la gestion | La réserve naturelle de Popenguine au Sénégal, les dunes du Cap Ferret ou la forêt de Chambord en France |
V | Paysage terrestre ou marin protégé : aire protégée gérée principalement dans le but d'assurer la conservation de paysages terrestres ou marins et à des fins récréatives | La chaîne de montagne Wuyi Shan en Chine, les parcs naturels régionaux de France, le parc national des Cévennes et les aires optimales d'adhésion des parcs nationaux français. |
VI | Aire Protégée de ressources naturelles gérée : aire protégée gérée principalement à des fins d'utilisation durable des écosystèmes naturels | Le parc national marin d'Alonissos en Grèce |
Le concept a été généralisé par la Convention sur la diversité biologique (CDB), qui recommande de protéger par des mesures spécifiques les zones marines et côtières particulièrement menacées, mais la plupart des conventions régionales pour la protection de l'environnement marin (OSPAR, Convention de Barcelone, etc.) préconisent la création de telles zones de protection.
Comme écrit plus haut, bien qu'un même type d'aires protégées puisse recouvrir des réalités différentes selon les pays, la même terminologie est souvent utilisée.
- Arrêté préfectoral de protection de biotope
- sité du Conservatoire du littoral
- Espace naturel sensible
- Forêt de protection
- Monument naturel
- Parc d'État
- Parc naturel
- Parc national
- Parc naturel régional
- Parc naturel marin
- Patrimoine mondial
- Réserve biologique
- Réserve de biosphère
- Réserve de chasse
- Réserve naturelle
- Réseau Natura 2000
- Convention de Ramsar
- Site classé ou inscrit (France)
- Zone de conservation
- Zone récréative
- Zone importante pour la conservation des oiseaux
- Zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique
Statuts des aires protégées dans le monde |
En Europe |
En Europe, les directives Oiseaux et Habitats sont à l'origine de la constitution d'un réseau d'aires protégées désignées par les états membres et formant le Réseau Natura 2000.
Belgique |
En Belgique, la conservation de la nature est une matière traitée par les régions. Outre les sites créés pour répondre aux directives Natura 2000, chacune des trois régions a créé diverses catégories d'aires protégées sur son territoire respectif: réserve naturelle, réserve forestière, parc naturel, paysages régionaux...
Bulgarie |
Les aires protégées de Bulgarie sont au nombre de 69. Ainsi, on dénombre 3 parcs nationaux, 11 parcs naturels et 55 réserves naturelles.
Espagne |
L'Espagne compte 4 types d'aires protégées différentes reconnues nationalement : parcs (nationaux), réserves naturelles, monuments naturels et paysages protégées. Il existe par ailleurs des sites dépendant des autorités régionales, comme aires naturelles d'intérêt spécial (es) reconnues par le gouvernement des Îles Baléares.
France |
En dehors des statuts internationaux, la création d’une aire protégée en France peut relever de trois échelons administratifs différents, du plus global au plus local et revêt une vaste variété de dénomination (parfois critiqué sous le nom de « Mille-feuille administratif »[42]). Les aires protégées profitant de l'une ou l'autre de ces réglementations peuvent se chevaucher pour tout ou partie.
Au niveau national, la désignation des sites se fait au niveau ministériel (ou par délégation, par les entités déconcentrées), pour les Parcs Nationaux, Parcs Naturels marins, Réserves nationales de chasse et de faune sauvage, Réserves Naturelles Nationales, sites classés ou inscrits... ou par un organisme public dédié comme le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres. La gestion de ces sites se fait de manière très variable, que ce soit « en propre » pour les Parcs (nationaux ou marins), par un organisme public (l'Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage ou autres établissements publics comme des syndicats mixtes), ou par une association de protection de l'environnement.
À l'échelle régionale, les collectivités peuvent mettre en place des Parc naturels régionaux, ayant essentiellement un objectif de développement durable et de maintien de la « ruralité », et s'appuient aussi sur les Réserves naturelles régionales et Corse, souvent mise en place et gérées par des associations (anciennes « réserves naturelles volontaires »), et sur les Conservatoire d'espaces naturels, responsables de sites naturels privés et publics.
Le Département peut appuyer sa politique d'aires protégées sur la participation à la trame verte et bleue au travers des Espaces naturels sensibles.
Hongrie |
La Hongrie compte 10 parcs nationaux, 145 réserves naturelles et 35 aires protégées.
Moldavie |
Les aires naturelles protégées de la République de Moldavie couvrent une superficie de 1 650 km2, soit 5 % du territoire du pays en 2013.
Serbie |
Les aires naturelles protégées de Serbie couvrent une superficie de 5 443 km2, soit environ 6 % du territoire du pays.
Suisse |
Parc d'importance nationale (Parc national et Parc naturel régional), Réserve naturelle.
En Amérique |
Argentine |
L'Argentine compte plusieurs catégories d'aires protégées définies nationalement (parcs, réserves, monuments naturels...), directement gérées par une administration nationale, et de nombreuses aires protégées dépendant des provinces, municipalités, associations de protection de l'environnement, voire entreprises privées.
Brésil |
Selon la définition utilisée, il peut s'agir de : « Unidades de conservação da natueza » (loi 9985/2000, qui régit l'art. 9, VI de la loi 6938/81), « sítios de remanescentes de quilombos » et « territórios indigenas », « áreas de preservação permanentes » (loi 4771/65, Code Forestier brésilien) et « áreas tombadas » pour sa valeur écologique.
Canada |
Québec |
Colombie |
Les aires protégées de Colombie sont gérées par le Sistema Nacional de Áreas Protegidas ou SINAP (en français Système National de Zones Protégées).
Pérou |
Au Pérou, le Servicio Nacional de Áreas Naturales Protegidas por el Estado (SERNANP)[43] gère 63 aires protégées (soit 14 % environ)[44], dont 8 parcs nationaux, 11 sanctuaires nationaux et historiques, et 8 réserves nationales. En parallèle, certaines aires protégées sont gérées directement par des administrations locales (Áreas de Conservation Regional) ou par des associations de protection de la nature (Áreas de Conservación Privada). La loi péruvienne prévoit également des « zones de réserves », possédant un statut temporairement jusqu'à leur classement officiel dans l'une ou l'autre des catégories.
En Asie |
Chine |
Inde |
Indonésie |
Japon |
Kazakhstan |
Mongolie |
- Parc national de Gobi Gurvansaikhan
- Parc national Gorkhi-Terelj
- Aire strictement protégée de Khan Kentii
- Aire strictement protégée de Bogd-Khan-Uul
Népal |
Pakistan |
Il y a actuellement 157 aires protégées au Pakistan qui sont reconnues par l'UICN.
Sri Lanka |
Au Sri Lanka, le Département de la conservation des forêts gère les aires protégées définies dans le « National Heritage Wilderness Area Act » de 1988, à savoir les réserves forestières et les forêts gérées durablement[45] et le Département de la conservation de la vie sauvage s'occupe des réserves naturelles, parc nationaux, corridors forestiers et sanctuaires définis par le « Flora and Fauna Protection Ordinance ». Le pays compte 501 aires protégées en 2009[46].
Yémen |
En Afrique |
Botswana |
Burkina Faso |
Burundi |
Cameroun |
Au Cameroun, la première aire protégée est créée en 1932, sous l'administration française. La création d'aires protégée est en augmentation depuis le Sommet de la Terre à Rio en 1992[47]. Elles sont réparties en 3 catégories: réserves naturelles, parcs nationaux (parfois d'anciennes réserves dont la dénomination a changé), et sanctuaires.
Côte d'Ivoire |
En Côte d'Ivoire, les aires protégées sont définies nationalement par le ministère de l'environnement et du cadre de vie, responsable des parcs nationaux et des réserves naturelle, et le ministère de l'environnement et des forêts, responsable des forêts classées.
Kenya |
Madagascar |
Mali |
Mauritanie |
La Mauritanie compte uniquement deux parcs nationaux: le Parc national du Diawling et le Parc national du Banc d'Arguin
Namibie |
Niger |
Le gouvernement nigérien désigne les aires protégées de son pays, gérées ensuite par la « Direction de l'Environnement », bureau du Ministère de l'Hydrologie et de l'Environnement[48]. En parallèle certains sites sont reconnus par des programmes ou des conventions internationales.
République centrafricaine |
Sénégal |
Le Sénégal compte 6 Parc nationaux, de réserves naturelles ou de faune sauvages, et a la particularité de désigner des aires marines protégées comme une désignation à part entière. Plusieurs forêts sont également classées.
Seychelles |
Les Seychelles ont désigné des réserves naturelles, des parcs nationaux terrestres et des parcs nationaux marins. 4 sites sont considérés par ailleurs comme des « réserves spéciales », typologie associée aux parcs nationaux[49].
Tanzanie |
Le cas particulier des forêts tropicales |
Elles abritent une grande partie de la biodiversité spécifique et génétique, actuellement menacées par la déforestation, l'exploitation forestière et l'anthropisation des forêts. Le manque de cartographie précises des menaces pesant le plus sur cette biodiversité a freiné les stratégies de conservation forestière[50] mais les l'écologie théorique prédisait aussi un recul de la biodiversité là où les massifs forestiers deviennent plus rares, plus petits et plus fragmentés[51]. Elle prédit un risque accru pour les espèces quand leur habitat ne compten plus que pour 10 à 30 % de ce paysage[52],[53],[54].
En 2016 une nouvelle étude confirme qu'en forêt tropicale la biodiversité est mieux conservée dans les paysages peu fragmentés par l’homme, mais aussi quand le dérangement par l'Homme est minimal (ce dérangement peut dans ces régions doubler la perte de biodiversité liée à la déforestation[55]). En 2017, il est confirmé que le recul mondial de la forêt naturelle érode de manière « disproportionnée » la biodiversité et conclue que les dernière grandes forêts et paysages « intacts » devraient être protégés concluent les auteurs[36]. Cette étude s’est basée sur les données les plus récentes disponibles sur les modifications du couvert forestier mondial[56],[57] pour étudier les conséquences du recul de la forêt naturelle ou semi-naturelle sur 19 432 espèces de vertébrés du monde entier figurant dans la Liste rouge UICN des espèces menacées à court ou moyen terme[36]. Sans surprise, là où le couvert forestier recule, les risques qu’une espèce soit classée comme menacée, qu’elle figure dans une catégorie de menace plus élevée et qu'elles présentant des populations en déclin augmentent « considérablement »[36]. Une information neuve est que ce risques est « disproportionné » dans des paysages relativement intacts et en particulier dans les vastes massifs forestiers tropicaux de Bornéo, d'Amazonie centrale et Forêt du bassin du Congo[36] où même une très faible déforestation a de graves conséquences pour la biodiversité des vertébrés (et donc très probablement donc pour les espèces qui en dépendent). Au rythme actuel de la déforestation - rien que pour les vertébrés - 121 à 219 autres espèces rejoindront la liste des espèces menacées dans les 30 prochaines années, et les effets du changement climatique pourraient aggraver cette situation, de même que la dette d'extinction[36]. Or l’artificialisation du monde s’aggrave rapidement[58] ; Or seules 17,9 % de ces trois zones sont actuellement formellement protégées et moins de la moitié (8,9 %) ont une protection stricte.Protéger ou restaurer l’intégrité écologique des forêts doit être fait à grande échelle par exemple via des « mégaréserves naturelles », réellement protégées (suggestion déjà faite en 2005 par C. Peres[59]) « pour éviter une nouvelle vague d'extinction globale »[36].
Notes et références |
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Voir aussi |
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Frédéric Ducarme, « Les aires protégées à l’épreuve de la réalité », sur Société Française d’Écologie, 25 novembre 2017.
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Liens externes |
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- DOPA, l'observatoire numérique pour les aires protégées
- Page sur l'évaluation de la conservation de la biodiversité, in situ, dans les aires protégées en Europe
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